Roger Nordmann et François Cherix, juste avant les élections fédérales, proposent d’élire une Assemblée constituante pour refonder la Suisse (à lire: «La Suisse ou la peur?», éditions Favre)
Ces deux socialistes romands y voient le moyen de combattre le nationalisme xénophobe ambiant. Ils en attendent, par exemple, un Gouvernement plus cohérent, une concordance réelle entre les forces au pouvoir, le réexamen de la structure du pays par cantons, la fin de la stigmatisation des étrangers et des marginaux, la sortie d’une solitude internationale illustrée par les tensions avec l’Europe et les chocs du secret bancaire.
Cette ardeur réformatrice exige du souffle. La Suisse moderne en est à sa troisième Constitution totalement révisée (1848, 1874, 1999). La dernière prend 34 ans. En 1965, le libéral Peter Dürrenmatt et le radical Karl Obrecht donnent le coup d’envoi. Nous sommes en pleine crise des avions «Mirage». Deux commissions se succèdent. Friedrich Traugott Wahlen (ancien Conseiller fédéral) et Kurt Furgler (Sage en place) les pilotent. En 1977, l’avant-projet suscite des oppositions véhémentes (rapports Confédération-cantons, droit de propriété, articles économiques et sociaux, etc). Dès 1985, on se limite à une «mise à jour» de la Charte (d’ailleurs intéressante). Mais le cadre de 1848-74 tient bon. En 1999, peuple et cantons acceptent. La réforme du Gouvernement, elle, est toujours en cours.
C’est à ce type d’épreuve que Nordmann et Cherix se mesurent. Le système suisse, l’un des plus stables, est aussi l’un des plus résistants. Il y faut des coureurs de fonds. On peut, on doit essayer.