01.06.2008
Giusep Nay – ancien juge fédéral et grand défenseur de l’indépendance du pouvoir judiciaire – est l’un des vrais vainqueurs de la bataille du 1er juin sur les naturalisations. La Suisse rejette à une majorité étonnante l’initiative de l’UDC pour le rétablissement du droit des communes à naturaliser par le peuple – sans recours et sans obligation de motiver les refus. Score net : 63,8% de non, seul Schwyz approuve. Pour gagner, l’UDC suisse avait massivement investi en affiches et en encarts publicitaires. Visiblement, son argent n’a pas suffi
Le Tribunal fédéral joue là un rôle capital. En 2000, la commune lucernoise d’Emmen, en vote populaire, refuse de naturaliser des gens des Balkans. Mais des Italiens sont agréés. Il y a discrimination. En 2003, le Tribunal fédéral, par deux arrêts célèbres, abolit donc les naturalisations par le peuple. Furieuse, l’UDC suisse lance son initiative. Dans la campagne du 1er juin, elle affronte la Conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, UDC modérée, « tombeuse » de Christoph Blocher six mois plus tôt. Et elle perd. Coïncidence étrange, l’UDC suisse choisit ce même 1er juin pour exclure la magistrate et l’UDC des Grisons.
Cette UDC suisse se heurte aussi à Giusep Nay. Premier juge fédéral romanche de 1989 à 2006, président de la Cour dès 2005, il défend fermement les deux arrêts. Selon lui, le gros défaut de l’initiative est de refuser le recours lors de naturalisations rejetées. Elle aurait été inapplicable. La Cour européenne des droits de l’homme s’en serait mêlée. Comme Eveline Widmer-Schlumpf, Giusep Nay – Grison comme elle – aura été une voix forte dans ce rude combat.