Oui, la Suisse romande existe. Georges Andrey, professeur d’histoire, le prouve («La Suisse romande, Une histoire à nulle autre pareille», Belvédère). Elle se construit par des alliances, des combourgeoisies (Fribourg-Payerne dès 1225), des concordats et des associations. L’expression « Röstigraben » surgit en Suisse alémanique pendant la Première guerre mondiale (la Suisse alémanique appuie les Empires centraux, la Suisse romande la France et ses alliés)
Le mot «Romandie» suit en 1919 (par Maurice Porta de la «Tribune de Lausanne» ?). Le «Tour de Romandie» cycliste décolle dès 1947. Curieux : la Suisse romande boude le mot, la Suisse alémanique non.
Attention ! La Suisse romande se construit « avec » plutôt que « contre » la Suisse alémanique. Les généraux romands Dufour (1847-59) et Guisan (1939-45), populaires Outre-Sarine, sont des symboles. Il y a des contretemps (ex : en 1992, seuls Bâle et les francophones approuvent l’Espace économique européen). Il arrive aux Romands de sauver des projets contestés (ex : double-majorité peuple-cantons pour la Société des Nations en 1920, majorité des cantons pour l’ONU en 2002). Mais une intégration très poussée des Romands peut échouer (ex : fusion Vaud-Genève en 2002).
Il n’y a pas de projet romand de sécession. Ecosse, Catalogne et Flandre – à première vue – ne suscitent pas de vocations. Chaque canton francophone a son histoire (Fribourg entre dans la Confédération en 1481, Vaud en 1803, Valais, Neuchâtel et Genève en 1815, Jura en 1978). Entre les 26 cantons suisses aussi, les fronts bougent. C’est peut-être une clé.