Lex USA et Convention Suisse-France: résistance. Bon pour Widmer-Schlumpf?

Le coup d’arrêt infligé par le Conseil national à la «Lex USA» sur les banques rend-il finalement service à la Suisse – et à sa ministre des Finances Eveline Widmer-Schlumpf?

Cette «Lex USA» doit encadrer le règlement de litiges fiscaux touchant des fraudeurs américains clients de banques helvétiques. Le Conseil des Etats vote oui, le Conseil national vote non. Certains voient dans ce refus un acte de résistance face à la puissance américaine.

Du coup, la France – dans un autre bras de fer fiscal – renonce à dénoncer au 30 juin une Convention de 1953 sur les successions (Radio Télévision Suisse, 30 juin). L’intention de la France est de remplacer l’actuelle imposition dans le pays de résidence du défunt (par exemple, la Suisse) par une imposition dans le pays de résidence de l’héritier (par exemple, la France). En Suisse, l’opposition est vive. A la mi-juin, le Conseil national vote une motion rejetant l’imposition à l’étranger de biens immobiliers situés en Suisse. Le refus de la «Lex USA» s’ajoute. Pour la Convention Suisse-France, cela donne une année de répit. Pour la «Lex USA», le Conseil fédéral doit encore se prononcer sur la suite.

Bref, le Parlement, pour le Gouvernement, peut jouer un rôle protecteur. Le peuple, au besoin, peut exercer la même fonction. Ce rôle protecteur peut se révéler utile dans d’autres domaines que les conflits fiscaux. On pense aux rudes négociations sur les relations institutionnelles entre la Suisse et l’Union européenne. Face à des partenaires de très grande taille, l’opération n’est pas sans risque. Mais, en cas de coup dur, cela peut aider. A vérifier.

Libre-échange et droit humains Suisse-Chine: Schneider-Ammann reçoit Li Keqiang

Johann Schneider-Ammann! L’homme-clé des relations Suisse-Chine, c’est lui. Le pilote de l’accord annoncé de libre-échange, c’est encore lui. Les 23 et 24 mai, le Conseiller fédéral – chef de l’Economie, de la Formation et de la Recherche – accueille le nouveau premier ministre chinois Li Keqiang. Avec Xi Jinping, c’est une figure majeure de la nouvelle direction chinoise. Ueli Maurer (Président de la Confédération, à la Défense) et Didier Burkhalter (aux Affaires étrangères) seront là

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Thatcher, Kopp, Leuthard et les autres se ressemblent peu. Mais il y a une trace.

Margaret Thatcher, unique femme Première ministre dans l’histoire britannique de 1979 à 1990, s’en va. Cette conservatrice ressemble peu aux sept premières Conseillères fédérales suisses. La dureté de son action en plusieurs occasions – ex: guerre des Malouines, bras de fer avec les syndicats et les nationalistes irlandais, promotion d’un libéralisme «pur», tensions avec l’Union européenne – n’a pas vraiment d’équivalent chez les femmes politiques helvétiques.


Même la Conseillère fédérale radicale Elisabeth Kopp (1984-1989), auxquels certains reprochent sa fermeté sur l’asile, est différente. La distance est plus grande avec les centristes Ruth Metzler (PDC, 1999-2003), Doris Leuthard (PDC, dès 2006) ou Eveline Widmer-Schlumpf (PBD, dès 2007). Là, c’est l’image d’une Angela Merkel, Chancelière chrétienne-sociale allemande, qui surgit. Enfin, les Conseillères fédérales socialistes Ruth Dreifuss (1993-2002), Micheline Calmy-Rey (2002-2011) et Simonetta Sommaruga (dès 2010) sont encore plus loin. Chez les femmes comme chez les hommes, il y a plusieurs manières de faire de la politique.

Pourtant, le libéralisme «pur» de Margaret Thatcher – combiné avec celui de son allié américain Ronald Reagan – influence la Suisse. Sa relation avec notre pays est bonne (visites en 1984, en 1990). On décèle des traces de son empreinte à droite. L’UDC remodelée par Christoph Blocher dès la fin des années 1980 en est une proche héritière (ex : «Bund» et «Tages-Anzeiger» du 9 avril, «Neue Zürcher Zeitung» du 10 avril, «Weltwoche» du 11 avril). Cette marque est-elle aujourd’hui moins visible? A vérifier.

Dalaï-Lama: les Conseillers fédéraux n’osent plus. Maya Graf, elle, osera

Aucun Conseiller fédéral n’ose plus saluer en public le Dalaï-Lama. Ainsi, aucune rencontre n’est prévue lors de la visite d’avril du chef spirituel tibétain. Cette prudence est nouvelle. Quatre Sages latins s’y risquent en 1991 (le socialiste René Felber), 1995 (le PDC Flavio Cotti), 2001 (la socialiste Ruth Dreifuss) et 2005 (le radical Pascal Couchepin). Mais Maya Graf, présidente écologiste du Conseil national, osera. Elle devrait recevoir le Dalaï-Lama le 16 avril

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Mercenaires et pistolets: Sommaruga et Schneider-Ammann aux commandes.

Entreprises de mercenaires en Suisse, c’est non. Exportations d’éléments de pistolets vers l’Arabie saoudite (via les Etats-Unis), c’est encore non. Le Conseil fédéral prend deux décisions qui font date. Elles tombent en plein Forum Economique Mondial de Davos. Six des sept Conseillers fédéraux y côtoient des chefs politiques du monde entier. Certains en seront étonnés.


Contre les entreprises de mercenaires, la socialiste Simonetta Sommaruga (Justice et Police) et le libéral-radical Didier Burkhalter (Affaires étrangères) sont aux commandes. Le Gouvernement y soumet une loi au Parlement. On y vise la participation à des hostilités, les violations graves des droits de l’homme, la mise en danger des intérêts de la Suisse. La protection de convois humanitaires, elle, est admise. La prison jusqu’à 3 ans est prévue. Contre l’exportation de pistolets, le libéral-radical Johann Schneider-Ammann (Economie) prend le relais. On rappelle le rôle répressif de forces saoudiennes au Bahreïn et en Arabie saoudite même.

Faut-il y voir des succès du centre-gauche ? Le Conseil fédéral actuel peut pencher des deux côtés. On y trouve deux socialistes (Simonetta Sommaruga et Alain Berset), une PDC (Doris Leuthard), une PBD (Eveline Widmer-Schlumpf), deux libéraux-radicaux (Didier Burkhalter et Johann Schneider-Ammann) et un UDC (Ueli Maurer). Ainsi, ce Gouvernement élargi peut aussi bien élever le statut de la Palestine à l’ONU que conclure un projet confidentiel de coopération militaire avec l’Etat d’Israël (« 24 Heures » et « Tribune de Genève » du 24 janvier). Tout cela est propice aux surprises.